vers une hausse du turpe le 1er aout 2021

Quel sera le poids de la transition énergétique sur la facture d’énergie des Français ? La question mérite de se poser au vu de l’impact qu’elle aura sur le budget des gestionnaires de réseaux.

La Loi Energie Climat acte, notamment, la baisse de la part du nucléaire dans la production d’électricité, pour atteindre 50 % en 2035 et prévoit que la France aura multiplié par plus de deux les installations éoliennes et par cinq celles de panneaux solaires. Or, les énergies renouvelables nécessitent une infrastructure bien plus connectée que ne le proposent aujourd’hui les réseaux de transport et de distribution d’électricité de l’Hexagone.

Dans sa dernière consultation sur les tarifs des réseaux, la CRE dévoile ainsi les demandes d’ENEDIS qui, pour absorber les coûts à venir, souhaite une augmentation sensible du TURPE lors du passage au TURPE 6 HTA-BT. Précédemment, c’est RTE qui avait demandé une augmentation du TURPE 6 HTB.

Synthèse des consultations précédentes et présentation des orientations finales de la CRE, cette consultation est la dernière avant l’adoption du projet de la décision tarifaire de la CRE qui sera soumis à l’avis du Conseil supérieur de l’énergie (CSE).

Une hausse sensible du TURPE dès 2021 ?

On apprend donc qu’Enedis demande une évolution du tarif avec une première marche tarifaire au 1er août 2021, puis en suivant le niveau de l’inflation. Cela conduirait à évolution tarifaire de + 6,4 % au 1er août 2021, puis à une évolution selon l’inflation, soit + 1,4 % en 2022, + 1,6 % en 2023, + 1,7 % en 2024. En appliquant un lissage de la hausse tarifaire sur 4 ans, cela correspond à une évolution annuelle du tarif de 3,7 % chaque année, entre 2021 et 2024 soit une hausse moyenne annuelle des tarifs d’électricité de près de + 1,2 % par an.

Suite aux analyses des demandes tarifaires d’Enedis et de RTE, la CRE estime, quant à elle,  que la hausse sur toute la période tarifaire du TURPE 6 devrait plutôt s’établir entre, en borne haute, autour de + 2,5 % par an et, en borne basse, autour de + 1,5 % par an. Soit une hausse moyenne annuelle des tarifs d’électricité qui serait alors comprise entre + 0,8 % et + 0,5 % par an.

Mais, « les analyses se poursuivent pour évaluer au mieux les impacts de la crise [du Covid] sur la période 2021- 2024 et seront finalisées pour la décision tarifaire à venir. »

Quoi qu’il en soit, il est clair que ni RTE ni Enedis ne pourront faire l’économie d’investissements massifs s’ils veulent répondre présents à l’heure de la transition énergétique. Des investissements dont le coût sera, in fine, reportés sur la facture d’énergie des Français.

La décentralisation du système électrique, pré requis à la transition énergétique

Rappelons qu’en France, les réseaux électriques sont constitués du réseau de transport géré par RTE (chargé de la très haute tension mais aussi garant de l’équilibre du système) et du réseau de distribution, dont la responsabilité incombe en majorité à Enedis, qui gère la moyenne et la basse tension.

S’ils veulent répondre aux ambitions de la programmation pluriannuelle de l’énergie, les réseaux ne peuvent plus être appréhendés comme de simples véhicules de l’électron : l’émergence de moyens de production renouvelables rebat les cartes en impliquant de profonds changements structurels.

Première contrainte, la localisation : la production des Enr se démarque par une localisation spécifique, proche de gisements de vent ou de soleil. Une localisation qui ne se situe pas forcément à côté de la demande : en l’absence de solutions de stockage performantes, le réseau doit se transformer afin de relier ces unités de production aux lieux de consommation et de les raccorder entre elles pour développer leur complémentarité.

Le besoin d’investissements sera notamment important quand le développement se fait dans des zones peu denses où les réseaux de transport et de distribution sont dimensionnés au plus juste : c’est typiquement le cas des centrales éoliennes qui sont implantées là où la densité de population est réduite.

La gestion de l’intermittence, un enjeu de taille

Seconde contrainte, la gestion de l’intermittence des Enr qui constitue un véritable défi pour Enedis et RTE. Les réseaux électriques ont été conçus pour acheminer l’électricité produite de façon centralisée dans un seul sens, de la production vers la consommation. Or, l’injection de la production issue des Enr implique un fonctionnement bidirectionnel des réseaux électriques.

Par ailleurs, la consommation d’électricité journalière est plutôt stable et ses pics sont attendus. Dépendante des conditions météorologiques, la production Enr est par nature moins prévisible, plus fluctuante et sera moins abondante en hiver, alors que c’est en cette saison que se situent les pics de consommation. Cette décorrélation rend plus complexe le travail du réseau qui est de garantir le maintien de l’équilibre entre offre et demande.

Il faut également rappeler que les réseaux électriques ont été développés avec le postulat que la quantité d’électricité injectée sur le réseau sera égale à tout moment à la quantité soutirée afin d’assurer le bon fonctionnement du réseau et la bonne qualité de l’électricité.

A l’avenir, ils vont se retrouver confronter à un fort de taux de pénétration par intermittence : une quantité de production d’électricité imprévisible que le réseau devra absorber. A titre d’exemple, le solaire photovoltaïque fournit des injections très importantes de courant en milieu de journée, alors que la demande est faible, ce qui pose problème en matière de modulation et de garantie de puissance.

Intermittence, caractère non pilotable et gestion de l’équilibre production/consommation : tel est le trilemme auquel sont d’ores et déjà confrontés RTE et Enedis et dont la résolution passera par un investissement, sur les 15 prochaines années, de 69 milliards d’euros pour le GRD et un investissement de 35 milliards d’euros pour le GRT.

Des investissements qui nécessairement impacteront à la hausse les factures d’énergie, à moins que les taxes pesant sur l’électricité baissent afin de garantir un prix de l’électricité bon marché. Ce qui ne semble pas à l’ordre du jour, compte tenu de l’augmentation annoncée de la taxe locale d’électricité…

Charlotte Martin
Responsable Communication

Sophie-Charlotte MARTIN, Conceptrice-Rédactrice spécialisée

Titulaire d'un master 2 en Lettres Classiques, complété d'un master 2 en Communication et d'un cycle web marketing à la CCI de Lyon, Sophie-Charlotte est intervenue sur des sujets aussi B2C que B2B, on et off line.

Régulièrement confrontée aux problématiques tertiaires et industrielles, elle s'est spécialisée en énergie. Aujourd'hui, elle garantit au quotidien la direction et la production éditoriale de l'entreprise. Sophie-Charlotte MARTIN est Responsable éditoriale d'Opéra Energie.