le conseil d'état rejette demande annulation fixation prix TRV

Dans deux décisions du 6 novembre 2019 , le Conseil d’Etat a rejeté les demandes d’annulation des décisions de fixation des tarifs réglementés du 27 juillet 2018 et du 28 mai 2019 et valide ainsi la méthodologie de construction des tarifs retenue par la CRE.

La fixation des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRV) n’est jamais un long fleuve tranquille. Régulièrement, les décisions de fixation des TRV par le ministre de l’énergie, font l’objet de recours en annulation.

La dernière décision, en date du 27 juillet 2018 et fixant les TRV à compter du 1er août 2019, n’a pas fait exception. Cette décision, qui prévoyait une hausse de 5,9% des tarifs résidentiels, déjà décalée à l’été du fait du mouvement des gilets jaunes, a fait l’objet d’un recours par les associations de consommateurs UFC-Que choisir et CLCV. Ces dernières contestaient notamment la prise en compte par la CRE du plafond ARENH dans le calcul du prix des TRV. Cette prise en compte du plafonnement de l’ARENH dans la construction des tarifs expliquait en effet une partie de cette hausse significative.

Dans un avis du 25 mars 2019, l’Autorité de la concurrence avait également émis un avis négatif sur cette prise en compte du plafond, et contestait ainsi la méthodologie de la CRE. Cette position du gendarme de la concurrence faisait suite à celle du 21 janvier 2019, dans laquelle l’Autorité se déclarait défavorable au principe de « placer EDF dans une situation équivalente à celle de ses concurrents au regard du plafonnement de l’ARENH pour construire ses offres ». Cet avis avait surpris beaucoup d’observateurs, notamment parce qu’il semblait peu fondé en droit, au regard des dispositions du code de l’énergie qui paraissaient peu équivoques.

Sans surprise, la décision du Conseil d’Etat donne raison à la méthodologie de la CRE : « En prévoyant que le deuxième alinéa de l’article R 337-19 du code de l’énergie, que le coût d’accès à l’électricité nucléaire historique doit être calculé en tenant compte, le cas échéant, de l’atteinte du volume global maximal d’électricité nucléaire historique susceptible d’être céder par la société EDF, le pouvoir réglementaire s’est borné, sans excéder sa compétence, à préciser les modalités d’application de la loi, afin de permettre le maintien d’une concurrence effective sur le marché de détail dans l’hypothèse d’une attient de ce volume maximal. »

La décision antérieure de fixation des TRV du 27 juillet 2018, applicable à compter du 1er août 2018 avait fait également l’objet d’un recours : cette fois-ci de la part, des fournisseurs alternatifs Engie et l’ANODE (Association nationale des opérateurs détaillants en énergie).  Ceux-ci contestaient certains points de la méthode de la CRE pour fixer le niveau des TRV : modalités de prise en compte du complément d’approvisionnement sur le marché, modalités de prise en compte de la garantie de capacité, méthode d’évaluation des coûts de commercialisation et de la rémunération normale d’un fournisseur.

Sur tous ces points, le Conseil d’Etat a rejeté les recours des fournisseurs alternatifs, validant ainsi la méthodologie utilisée par la CRE.

Un seul point a fait l’objet d’une annulation : la proposition de la CRE prévoyait le maintien des TRV pour les sites des grandes entreprises tant que ceux ne modifiaient pas leur souscription : « Les sites non résidentiels appartenant à des grandes entreprises qui sont fournis aux tarifs réglementés peuvent conserver leur tarif dès lors qu’ils ne modifient pas leur option, leur puissance souscrite ou leur version. ». Les grandes entreprises visées étaient les entreprises ayant soit, plus de 5000 salariés, ou dont le chiffre d’affaire dépasse les 1,5 Milliard d’euros ou dont le total du bilan excède 2 milliards d’euros.

Le Conseil d’Etat a jugé que ce maintien n’était pas conforme avec les directives européennes et a annulé cette disposition. A ce stade, il est difficile d’évaluer la portée pratique de cette décision mais on peut légitimement penser que l’ensemble des sites de ces grandes entreprises ne peuvent plus bénéficier du tarif réglementé et doivent basculer au plus vite en offre de marché. La loi Energie climat, promulguée le 10 novembre 2019 devrait de toute façon clarifier la situation : le texte prévoit la suppression des TRV pour les entreprises (hors TPE) à compter du 1er janvier 2020. Voir notre article sur le sujet.

Ainsi, le Conseil d’Etat avec ces deux décisions vient clarifier les doutes qui pesait sur la construction des TRV.  Jusqu’au prochain recours… ou la prochaine loi…

[1] CE, 9/10 ch. réunies, 6 novembre 2019, Société Engie et Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, n° 424573, 424576, 424586, 424589, 424590.
[2] CE, 9-10 ch. réunies, Associations « UFC Que Choisir » et « Consommation, logement et cadre de vie », n° 431902.

 [3] Autorité de la concurrence Avis 19-A-07 du 25 mars 2019

[4] Autorité de la concurrence Avis 19-A-01 du 21 janvier 2019

Charlotte Martin
Responsable Communication

Sophie-Charlotte MARTIN, Conceptrice-Rédactrice spécialisée

Titulaire d'un master 2 en Lettres Classiques, complété d'un master 2 en Communication et d'un cycle web marketing à la CCI de Lyon, Sophie-Charlotte est intervenue sur des sujets aussi B2C que B2B, on et off line.

Régulièrement confrontée aux problématiques tertiaires et industrielles, elle s'est spécialisée en énergie. Aujourd'hui, elle garantit au quotidien la direction et la production éditoriale de l'entreprise. Sophie-Charlotte MARTIN est Responsable éditoriale d'Opéra Energie.